L’ère numérique a changé radicalement la manière dont nous concevons le médium de la photographie. A l’inverse des Man Ray et Robert Doisneau qui mettaient attentivement en scène leurs clichés, nous « cliquons » à volonté à la manière du jeune Jacques Henri Lartigue.

C’est ce qui se passe ici. De la même manière que je porte avec moi un carnet, j’ai toujours un appareil photo près de moi, et lorsque je vois quelque chose qui m’interpelle, je fais « clic ». Un peu comme mes croquis faits de quelques lignes, ces photos sont une manière pour moi de revenir à une partie de ma mémoire visuelle que je veux explorer plus avant.

En dépit du fait que je les présente toutes ensemble, il y a ici plusieurs catégories qui ont un sens d’un point de vue expérimental.

Il y a des gens rencontrés dans différentes parties du globe ; des dessins faits par des gens dans des endroits divers, ou juste des accidents ayant laissé des marques sur un mur ou une rue ; je suis aussi fasciné par les panneaux routiers ; il y a là une catégorie que nous pourrions appeler « Les murs parlent » ; et enfin une catégorie de photos peut-être plus classiques.

A vous de décider à quelle catégorie appartiennent les photos que vous regarderez, ou peut-être souhaiterez-vous créer vos catégories à vous…

Mon professeur et mentor Jules Engel a été interviewé l’année avant sa mort. Soudain, la personne qui l’interviewait a remarqué un petit collage fait de bandes de papier coloré sur un coin de son bureau, et lui a demandé ce que c’était. Il a répondu : « Oh oui, l’homme de ménage allait jeter ces bandelettes de papier à la poubelle. J’ai alors regardé par terre, devant le balais, et soudain, j’ai vu ces bandes de papier qui fonctionnaient d’une certaine manière. J’ai demandé au monsieur si je pouvais les prendre. Il m’a regardé très surpris, a sourit, puis a bien entendu accepté. Alors j’ai fait ce collage. Vous voyez comme ça fonctionne visuellement ? »

Peut-être cette anecdote vous aidera-t-elle à mieux appréhender mes photos…